On considère l’équation polynomiale du deuxième degré suivante
Si le coefficient de x2 est différent de 1, disons a, il suffit, pour obtenir la forme ci-dessus, de diviser chaque terme à gauche et à droite par a. Un tel polynôme, dont le coefficient du terme de plus haut degré est 1, est dit unitaire (monic polynomial en anglais).
Bref, cette équation possède deux solutions, réelles (distinctes ou non) ou complexes (conjugués l’une de l’autre). On appelle ces deux solutions r et s et on considère l’expression
Si les deux solutions sont réelles et distinctes, alors il est certain que
car le carré d’un nombre réel non-nul est toujours strictement positif. Si le polynôme a une solution réelle double, c’est-à-dire si alors on a évidemment
Enfin, si les deux solutions sont complexes (dans le sens de non réelles), alors on a
En effet, les deux solutions complexes du polynôme sont les conjugués l’une de l’autre. Ainsi en posant,
avec t et u réels, on peut calculer
et obtenir
ce qui vérifie effectivement
puisque u étant non-nul, u2 est strictement positif et –u2 strictement négatif. On peut donc considérer, à juste titre, l’expression
que l’on baptise δ et qui met en vedette les solutions de l’équation, comme un discriminant de l’équation : le signe de δ détermine si l’équation du départ possède deux solutions réelles distinctes (δ est strictement positif), une solution réelle double (δ est nul) ou deux solutions complexes (δ est strictement négatif).
C’est cependant un peu embêtant de devoir connaître r et s pour découvrir la nature de… r et s. Qui plus est, on connaît notre bon vieux
calculé commodément à partir des coefficients de l’équation initiale. Mais voilà, on peut établir un lien entre δ et Δ. En effet, si r et s sont les solutions, alors notre polynôme unitaire se factorise comme
ce qui donne en développantet on trouve ainsi
Par ailleurs,
et en remplaçant par b et c on obtient
Ah ! On a donc
Fascinant ! L’intérêt de considérer le discriminant sous cette forme est que cette technique s’applique aux équations polynomiales de degrés supérieurs à 2 : on peut donc trouver des discriminants pour ces équations et tirer des informations sur les solutions à partir des coefficients. On considère à titre d’exemple la forme réduite de l’équation polynomiale de degré 3 suivante (au besoin, on peut toujours réduire)
C’est aussi une équation unitaire. Cette équation possède 3 solutions réelles distinctes, 2 solutions réelles distinctes (dont une double) ou 1 solution réelle et 2 complexes (toujours dans le sens de non-réelles, et qui sont les conjugués l’une de l’autre).
La méthode “intuitive”
Pour chercher de l’information sur les zéros et en utilisant un minimum (!) de calcul différentiel, on pourrait étudier la fonctionCette équation polynomiale unitaire de degré impair passe du négatif pour des x suffisamment petits au positif pour des x suffisamment grands. Elle possède aussi au plus deux changements de croissance/décroissance.
L’étude de cette fonction, sans le terme en x2, est par ailleurs assez facile. La dérivée de cette fonction est
En posant la dérivée égale à 0
on trouve les abscisses des extrema
En posant acomme la racine positive, on peut déduire les résultats suivants. Si
alors la fonction possède un zéro réel et deux zéros complexes. Si
alors la fonction possède deux zéros réels distincts, dont un zéro double. Si
alors la fonction possède trois zéros réels distincts. Si
alors la fonction possède deux zéros réels distincts, dont un zéro double. Enfin si
la fonction possède un zéro réel et deux zéros complexes.
On peut réécrire les cinq cas précédents de manière plus concise en vérifiant que les trois cas suivants sont équivalents. Sialors la fonction possède un zéro réel et deux complexes. Si
alors la fonction possède deux zéros réels distincts, dont un zéro double. Enfin si
alors la fonction possède trois zéros réels distincts. Pour le calcul de
il suffit de multiplier
et de quelques étapes algébriques assez simples mais un peu fastidieuses
On multiplie par -27, pour des raisons qui ne sont peut-être pas claires. Multiplier par 27, oui, pour se débarrasser du dénominateur, mais -27 ? On obtient
On pose :
notre discriminant, et, puisqu’on a multiplié par un négatif, on change les signes de côté dans les inéquations précédentes. Ainsi, avec
si
alors l’équation possède une solution réelle et deux solutions complexes. Si alors l’équation possède deux solutions réelles distinctes, dont une solution double. Enfin si
alors l’équation possède trois solutions réelles distinctes.
La méthode des zéros
De manière analogue à ce qu’on avait fait avec l’équation du deuxième degré, on considère l’expression
où r, s et t sont les trois solutions à l’équation. Les solutions d’une équation réduite du troisième degré ont la forme
c’est-à-dire la somme de deux racines cubiques. On pose
où A et B sont les racines cubiques telle que r est réel (il y a toujours au moins une racine réelle). En d’autres mots, on choisit A et B tels que
Les deux autres solutions sont
et dans lesquelles
et
sont les racines cubiques de l’unité. Le calcul de
peut s’avérer fort fastidieux alors on fait preuve d’astuce. On peut vérifier que
et comme
on peut effectuer une mise en évidence double et trouver
De la même manière, on trouve
et
Enfin, on aqui donne finalement
Ainsi, en remplaçant dans l’expression de δ, on obtient
Or comme
l’expression précédente devient
Ouf ! En se rappelant que A et B étaient les racines cubiques, on trouve finalementEt c’est non sans un certain plaisir qu’on distribue le -27 à l’intérieur des parenthèses pour obtenir
le discriminant de l’équation polynomiale réduite du troisième degré. Et encore une fois, on bien
Référence : Ron Irving, (2013) Beyond the Quadratic Formula